Lettres de Jean Nicoli


Jean Nicoli a écrit à ses enfants et à ses amis de la cellule 3, le 30 août, vers trois heures du matin, juste avant que ses bourreaux » (les Chemises noires), ne viennent le chercher pour l'assassiner sauvagement.

Francette, sa fille, a pieusement conservé ces lettres griffonnées à la hâte sur l'emballage d'un paquet de « bleues » (des cigarettes).
 

« A mes enfants »

« Tout à l'heure je partirai. Si vous saviez comme je suis calme, presque heureux de mourir pour la Corse et pour le parti.
Ne pleurez-pas, souriez-moi. Soyez fier de votre papa. Il sait que vous pouvez l'être, la tête de Maure et la fleur rouge, c'est le seul deuil que je vous demande.
Au seuil de la tombe, je vous dis que la seule idée qui, sur notre pauvre terre, me semble belle, c'est l'idée communiste.
Je meurs pour notre Corse et pour mon Parti »

 

Les phrases ci-dessous sont extraites d'une lettre que Jean Nicoli avait rédigée, le 29 août 1943, à l'intention de ses enfants, dans la prison de Bastia ou, condamné à mort par un tribunal militaire italien, il attendait son exécution:

"Demain à 4 heures, je serais fusillé si je n'ai pas la grâce. Je vais essayer d'analyser l'état d'esprit d'un homme près de la mort, près d'elle que vous redoutez tant. Je remarque que ceux qui pensent aux condamnés à mort, comme j'y pensais, ont une toute autre idée de la réalité. Ils se figurent que les dernières heures des condamnés doivent être terribles. Eh bien non! L'homme est né pour survivre et sa nature s'adapte à toutes les situations...
...Ne pleurez pas trop sur les êtres qui partent. Vous êtes beaucoup plus à plaindre que nous. Je sens que tout à l'heure, je vais me reposer sur la douceur moelleuse du sommet. Vous vous dites, comme ce doit être terrible de savoir qu'on va être fusillé dans quatre heures, et non, vous voyez bien."

 

  « Le couloir entre la vie et l'au-delà envoie ceci aux amis de la cellule 3 »

« Nous montrerons au procureur du roi qu'il y a des Corses qui sont encore dignes de leurs aïeux et qui sauront mourir en dignes fils de Cyrnos…
Nous espérons que notre sang vous donnera le courage de supporter toutes les tristesses de la prison et qu'il vous donnera l'espoir en des jours meilleurs que nous sentons proches, nous qui mourons.
Nous mourons heureux pour la cause que nous avons servie.
Votre souvenir à vous, amis de la cellule 3, Acquaviva, Giuntini, Franchi, Faggianelli, nous sera cher et une pensée sera pour vous. Puisse-t-elle vous porter bonheur !
Nous mourrons en Corses français et le procureur du roi l'entendra de ses oreilles »