L'île des justes
La Corse est le seul département dans lequel il n’a été procédé à aucune déportation de Juifs, à une exception près :
"Il y a eu malgré tout un déporté, un seul, un peu comme l’exception qui vient confirmer la règle…
C’est vrai, Ignace Schreter, un juif allemand réfugié dans l’île a été arrêté le 30 septembre 1942 et déporté à Sobibor où il a péri, mais c’était en quelque sorte accidentel. Il a été arrêté sur ordre du secrétaire général de la préfecture d’Ajaccio qui a profité de l’absence du préfet, retenu ce jour-là à une conférence interrégionale à Marseille, et qui, lui, avait eu le cran de désobéir aux circulaires du pouvoir". Serge Klarsfeld in Tribune juive http://fr.wikipedia.org/wiki/Serge_Klarsfeld
Analyse de la spécificité corse
« S’il n’y avait eu que des gens comme ça, des policiers qui se disaient français et livrèrent Danielle Casanova, comme tant d’autres, à l’ennemi. Comment oublier leurs crimes ? Nous aurions aujourd'hui encore honte de la France. Il y eut, heureusement, l’éclatante réponse de la résistance. » Geneviève de Gaulle
Alors que sur le continent la police française rafle les juifs pour les remettre aux Allemands tandis que les badauds détournent le regard, quand ils n'en rajoutent pas injures rascistes à l'appui, les Corses vont protéger les juifs et les aider à s'intégrer.
Les raisons pour l'expliquer se trouvent :
dans la spécificité du comportement corse :
- Les juifs qui se réfugient chez nous seront nos amis puisque nos ennemis les pourchassent. Aider les Juifs comme on aiderait tout visiteur, selon la tradition d'hospitalité historique en Corse
Cette tradition a perduré dans l'île tout au long de son histoire jalonnée de toutes sortes d'envahisseurs et d'oppressions. Au XVIIIéme siècle, les juifs persécutés partout en Europe ont trouvé refuge dans la Corse de Pascal Paoli.
Et pendant la première guerre mondiale des juifs se sont réfugiés en Corse :
Et c'est toujours l'hospitalité corse qui a permis en 1940 qu'aucun juif ne fut livré aux aurorités françaises de Vichy, échappant ainsi aux camps de la mort.
Mérimée s'est interessé en ethnologue aux moeurs corses - le journal “Le Globe a publié du 25 mai 1926 au 6 mars 1827 six articles sur l'honneur et l'hospitalité corse.
- Le tempérament frondeur du Corse -comme peut-être celui des iliens en général- qui supporte difficilement une autorité trop oppressive
Il a coutume de se référer à une justice familiale et villageoise plutôt qu'à celle du gendarme et à l'application de la loi. Ceci explique que la plupart d'entre eux sont réfractaires à la délation et la dénonciation.
dans le comportement du Préfet Paul-Louis Balley
"Le préfet Paul-Louis Balley qui, avec les sous-préfets Pierre-Henri Rix à Bastia et Jacques Ravail à Sartène, a dissimulé la présence des juifs étrangers dans l’île…
Avec l’assentiment des services de police et de gendarmerie, ils ont prétexté un afflux de « touristes » et ils ont même délivré de vrais-faux passeports turcs. Les archives sont éloquentes sur cette attitude tout à fait inédite en France au niveau des préfets puisque dans tous les autres départements, il y a eu des déportés en nombre. D’ailleurs, après la diffusion du documentaire, j’ai demandé au comité Yad Vashem d’accorder au préfet Balley, diplômé en langues orientales, qui parlait l’hébreu et dont la fille a été fiancée au fils d’un commerçant juif de Bastia, la Médaille des Justes" source Tribune juive
La Corse, île des justes ?
http://www.tribunejuive.info/communaute/la-corse-ile-des-justes-aucun-juif-ny-fut-livre
Commentaire de Brigitte Thévenot-Peressini publié le 13 novembre 2013 dans Tribune juive infos <WWW.tribunejuive.info>
« Quand en août 42, Vichy réclame via le Télégramme 12 520 que les « opérations de ramassage » des Juifs étrangers commencent, les juifs seront protégés par toute une population et son administration, police et gendarmerie inclues, jusqu’à leurs fournir de faux-papiers turcs (…). Durant tout le conflit, on ne portera pas l’étoile jaune en Corse.
Cette insoumission populaire, (…) est encouragée par l’action et le courage (…) de Paul Louis Emmanuel Balley, Préfet de Corse de 1940 à 1943, dont l’attitude d’insubordination passive va être remarquable d’efficacité. (…) Le recensement des populations juives étrangères qu’il transmet à sa hiérarchie en 42 est un modèle du genre : 146 noms, pas un de plus, pas un enfant, et tous sont français. (…) Seule exception à ce sauvetage de masse, sans que l’on s’en explique encore les raisons, un juif tchèque qui sera déporté à Sobibor. (…)
L'auteur souligne « la particularité de cette « mentalité corse » qui, au long des siècles, a toujours su accueillir les perdants de l’Histoire. Les Juifs chassés d’Espagne par Isabelle La Catholique notamment (1492), et qui viendront en masse contribuer à fonder des villes comme Ajaccio ou l’Ile Rousse. (…) Mieux, ces parias de l’Histoire trouveront en Corse des hommes prêts, en 1755, (…) à offrir aux Juifs le 1er statut de citoyens à part entière. (…) »
L'histoire des juifs en Corse
http://www.harissa.com/news/article/lhistoire-des-juifs-en-corse#.VN_9aR5t4NE.mailto
Article | ven, 23/05/2014 - 04:20
L'histoire des juifs en Corse
L'histoire des Juifs en Corse remonte à plusieurs centaines d'années. Les premières traces d'une présence juive dans l'ile se situent aux alentours de l'an 800.
A cette époque, une importante immigration venue d'Egypte s'est installée dans le Sud de la Corse ; une grande partie de ces femmes et hommes juifs parlaient et écrivaient l'hébreu. La majorité d'entre eux s'est implantée à proximité d'un village dénommé Levie (la bien nommée), situe à l'intérieur des terres à 20 km environ de Porto-Vecchio. Par la suite, les membres de la communauté se sont dispersés un peu partout dans l'ile en devenant partie intégrante de la population autochtone et dans certains villages de montagne, des églises gardent encore la trace de documents rédigés en hébreu à côté de ceux rédigés en latin. Bien des siècles plus tard, dans les années 1500-1530, environ 1000 Juifs de la région de Naples trouvèrent refuge en Corse, fuyant très certainement une persécution locale, et ils s'installèrent dans les régions montagneuses du centre de l'ile. En l'an 1684, la ville de Padoue, située en Italie, qui était peuplée en grande partie par des Juifs qui habitaient un ghetto édifié en 1516, fut le théâtre de violences dirigées contre ses citoyens juifs, dont une partie faillit se faire lyncher. Une rumeur malveillante selon laquelle leurs coreligionnaires de Buda, avaient commis des actes de cruauté contre les Chrétiens de la ville hongroise, déclencha cette flambée de brutalité dirigée contre la communauté juive de la ville. C'est grâce à l'intervention d'un père Franciscain nomme Père Marco qui écrivit une lettre afin de dénoncer cette mystification, que la communauté juive échappa au massacre annoncé. Une grande partie de la communauté juive de Padoue décida à la suite de ces événements d'émigrer sous d'autres cieux plus cléments. Certains arrivèrent en Corse, et les habitants les nommèrent Padovani, ce qui signifie : venu de Padoue. Le nom de famille Padovani est un nom très répandu de nos jours en Corse.
Les Rois de France expulsent les Juifs, les Corses les invitent pour régénérer l'ile
Mais la plus importante vague d'immigration juive qu'ait connue la Corse se situe entre les années 1750 et 1769. La première république constitutionnelle et démocratique d'Europe venant de naitre, le leader de l'époque Pascal Paoli fit venir en Corse entre 5000 et 10000 Juifs du nord de l'Italie, (les chiffres varient selon les sources) de Milan, de Turin ainsi que de Gènes pour revitaliser l'ile suite à 400 ans d'occupation génoise. Afin de les rassurer sur leur intégration et sur la volonté du peuple corse de les considérer comme leurs égaux, ce même Paoli fit une déclaration destinée aux nouveaux venus : "Les Juifs ont les mêmes droits que les Corses puisqu'ils partagent le même sort". Cela fit comprendre aux Juifs qu'ils étaient des citoyens à part entière et qu'ils bénéficiaient d'une totale liberté de culte, ce qui n'était pas le cas dans bon nombre de pays.
En réalité, c'est plus de 25% de la population corse qui aurait des origines juives.
Ces immigrants portaient pour la plupart des noms à consonance ashkénaze, qui étaient très difficilement prononçables par la population locale. Une partie d'entre eux étant roux, ils se virent affubles du surnom de Rossu qui signifie rouge et désigne les rouquins ce qui donne au pluriel Rossi, nom extrêmement répandu en Corse. En réalité, c'est plus de 25% de la population corse qui aurait des origines juives. En lisant les états civils, on peut facilement s'en rendre compte : les noms tels que Giacobbi, Zuccarelli, Costantini, Simeoni... très communs dans l'ile de Beauté, ne laissent planer aucun doute quant à leur origine.
Le nombre peu important des membres de la communauté juive, ajoute au fait que les Corses n'ont fait aucune différence entre les originaires de l'ile et ces nouveaux venus, est très certainement à l’origine d'un grand nombre de mariages mixtes qui déclenchèrent une assimilation quasi-totale. Malgré cela, les signes sur l'ile de beauté d'une ancienne présence juive y sont très nombreux ; un exemple probant en est le nom d'un village Cazalabriva qui selon plusieurs sources concordantes viendrait de: casa di l'ebreo, littéralement la maison de l'hébreu (le mot juif n'existant pas en Corse). Ou bien encore, de nos jours dans certaines régions, il subsiste une tradition très ancienne de donner aux nouveau-nés des prénoms d'origine hébraïque tel que Mouse (Moise) etc. ...
Plus proche de nous, durant la seconde guerre mondiale, alors que la Corse était occupée par les fascistes italiens, les habitants de l'ile se mobilisèrent pour aider les Juifs à se cacher. Avec les moyens du bord, ils aidèrent hommes, femmes et enfants à se refugier dans les villages de montagne. Un haut fonctionnaire français accomplit un travail admirable et, au mépris de sa vie, sauva à lui seul, plusieurs dizaines de Juifs. Il s'agit du sous préfet de Sartène Pierre-Joseph Jean Jacques Ravail. Il travaillait avec le réseau mis en place par les partisans de Paul Giacobbi, grand père de l'actuel préfet de Haute-Corse qui refusait d'opter pour la voie de la collaboration.
La Corse apporta sa contribution à la création de l'Etat d'Israël.
La Corse eut donc une attitude plus qu'honorable envers les Juifs persécutés, et pas seulement pendant la Seconde guerre mondiale. En effet, c'est le seul endroit en Europe ou l'on n'eut jamais à déplorer des actes antisémites, et cela mérite d'être dit. En 1947, la Corse apporta sa contribution à la création de l'Etat d'Israël. Des Corses d'alors décidèrent de secourir les combattants juifs luttant pour leur indépendance et pour former leur Etat. Leur mission: accueillir des avions qui vont être bourrés d'armes pour s'envoler vers des lieux gardés par la Haganah. Ajaccio est alors choisie comme piste d'atterrissage. Des hommes, parmi eux des policiers mais aussi des voyous, rendent visite au préfet de l'époque; il a pour nom ... Maurice Papon.
L'homme a un passé confus, trois Corses lui expliquent que l'aéroport d'Ajaccio sera réservé à ces transports d'armes. Les Corses bénéficient de l'accord du gouvernement socialiste qui ne peut agir ouvertement. Maurice Papon ferme donc les yeux et il laissera filer parait-il le bébé. Les armes transiteront par la Corse pour s'évaporer vers le futur Etat juif. Il ne faut pas oublier de souligner qu'hormis toutes les vagues d'immigration juive qu'ait pu connaitre la Corse, des individus isolés sont venus s'y installer, provenant notamment des communautés juives d'Afrique du nord. De nos jours, la communauté juive de l'ile, très peu nombreuse, se concentre essentiellement à Bastia. Son président Mr Ninio, natif de Tibériade, ouvre deux fois dans l'année la synagogue qui possède deux Rouleaux de la Torah en parfait état: pour Roch Hachana, le jour de l'an Juif et Yom Kipour. Les jeunes, pour la plupart, quittent l'ile pour aller étudier sur le continent et bien souvent ils y rencontrent leur moitié et s'y installent définitivement. Il existe en Corse de très nombreuses personnes soutenant l'Etat d'Israël dans la période difficile qu'il traverse actuellement. Parmi ces amis d'Israël, certains sont allés jusqu'a écrire des missives au président français Jaques Chirac, à la Haute Cour internationale de La Haye ainsi qu'aux medias français, afin de dénoncer la politique européenne et française, en particulier, toujours pro palestinienne. Ce soutien inconditionnel s'explique en partie par le fait que beaucoup de corses ont le sentiment qu’il y a un gouffre entre ce qui se passe réellement et ce qui se dit dans les medias Français au sujet de ces deux communautés.
Du reste, une association Corse - Israël s'est créée afin de rapprocher les deux communautés et de développer le dialogue entre elles.