Revue de presse autour de la réédition
Jeudi 3 Novembre 2011
L’épopée de la Résistance en Corse
Tous bandits d’honneur, de Maurice Choury. Éditions Alain Piazzola, 300 pages, 12 euros. Impossible de résumer en quelques lignes le récit par Maurice Choury, un des acteurs et hauts responsables de la véritable épopée qui permit à Ajaccio d’être la première ville de France libérée de l’occupation fasciste, le 9 septembre 1943 ; et à la Corse tout entière d’être le premier département à avoir débarrassé son sol de la soldatesque allemande et italienne, un mois plus tard.
Comment choisir entre des dizaines d’étonnants faits d’armes et d’actes d’héroïsme jalonnés, hélas, par de sanglantes tragédies ? Comment et pourquoi rendre hommage à l’action de tel dirigeant plutôt qu’à tel autre, ou citer le dernier écrit d’un martyr plutôt que d’un autre ? Rappelons donc ce qu’en disait Arthur Giovoni, président du Front national pour le département de la Corse sous l’Occupation, et député maire communiste d’Ajaccio après la Libération : « Malgré les nombreux écrits des chroniqueurs inspirés par cette fulgurante action armée, il manquait le témoignage des acteurs eux-mêmes. On le réclamait. Le voici. (…) Les faits qu’il mentionne sont des faits réels, contrôlés auprès des acteurs (…) Cette histoire véridique de la Résistance corse a le mérite de sauver un patrimoine qui risquait de sombrer dans la légende. »
Cette quatrième édition de l’ouvrage (*) se distingue essentiellement des précédentes par la reproduction de dizaines de documents recueillis au cours de patientes recherches par Hyacinthe Choury et Isaline Amalric-Choury, les enfants de l’auteur. Ces documents – certains déjà connus, d’autres inédits – occupent 80 pages de l’ouvrage. Ils sont aussi passionnants, instructifs et bouleversants que le récit qu’ils enrichissent. On y trouve les fac-similés de numéros clandestins de l’Avant-Garde et de Terre corse, journaux de la Jeunesse et du Parti communistes, du Patriote, organe du Front national corse. Ceux de lettres, ordres de mission, directives politiques et militaires faisant suite aux décisions des responsables du Parti communiste et du Front national, qui réunissait communistes et non-communistes. On y trouve la reproduction de tracts édités dans leur langue en direction des soldats italiens. On y découvre la liste des lieux de parachutage et les messages sibyllins radiodiffusés de Londres à l’intention des maquisards, celle des responsables de cantons et de villages. Celle aussi, combien émouvante, de 250 martyrs de la Résistance et héros de la libération de la Corse.
Confirmant le récit de Maurice Choury, la consultation de ces pièces historiques – citons entre autres le courrier échangé entre Annibal (pseudo de Choury) et Luc (Giovoni), et le message du général Giraud – témoigne de la part déterminante prise par les communistes du début à la fin du combat libérateur. Elle éclaire aussi les raisons politiques des divergences stratégiques qui, le 5 août 1943, opposèrent au sein même du comité départemental du Front national de Corse les responsables communistes, partisans de préparer l’insurrection populaire, aux représentants du Comité français de libération nationale qui, obéissant aux ordres venus d’Alger, préféraient temporiser dans l’attente d’un futur débarquement des troupes alliées. Cependant, trois semaines plus tard, la direction du Front national parachevait les préparatifs de l’insurrection. Et dans la nuit du 8 au 9 septembre, elle lançait au peuple corse l’appel à engager le combat « partout et sans délai ».
(*) Disponible au comité des anciens combattants et amis de Résistance, Maison du combattant, 1, boulevard Sampiero 20000 Ajaccio. Chèque de 15 euros à l’ordre de l’Anacr 2A. Jean Rabaté
Dominique Bucchini, président de l'Assemblée de Corse, 9 septembre 2011 – Espace Diamant - Ajaccio
« Il y a des livres qui ne nous quittent pas. Comme un ami auquel nous rattachent tant de moments importants de notre vie et auquel on pense souvent, comme une maison qui nous a vus grandir et où nous savons retrouver tant de souvenirs. Ces livres là, rares, nous les gardons en mémoire longtemps après avoir tourné la dernière page ; un nom de personne ou de lieu soudainement les évoque, certaines circonstances les font invariablement advenir à la conscience. Ces livres font partie de nous. Pour moi, il en est ainsi de « Tous Bandits d’honneur » de Maurice CHOURY ; pour moi et, j’en suis sûr, pour beaucoup d’entre vous, cet ouvrage est un repère dans le passé, un phare illuminé par l’épopée qu’il raconte et qui, à travers lui, éclaire le chemin. Lorsque le livre parut, en 1956, peu de temps, finalement, après que les armes se soient tues, bien que l’histoire fut toujours chaude et proche, il reçut une approbation quasi-générale car il respectait les faits, l’équilibre des différentes branches de la Résistance, traduisant l’honnêteté intellectuelle de son auteur. Basé sur une documentation de première main, il devint une référence. Acteur de premier plan de cette période, Maurice CHOURY se fit journaliste relatant les faits, mémorialiste rendant hommage à ses camarades de combat, historien rendant compte de l’histoire immédiate ».